mardi 30 juillet 2013

Chronique Martiniquaise (8) : Le français ensoleillé de Martinique — Première partie

En Martinique, on parle le créole qui, comme chacun sait, est la langue maternelle d’une bonne partie de la population. Comparé à d’autres langues régionales de France comme le breton ou l’occitan, le kréyòl martiniquais se porte plutôt bien, n’ayant pas encore été expédié au purgatoire des langues moribondes par les coups de boutoir d’une République  vengeresse qui se veut centralisatrice et uniformisante et n’a eu de cesse de terroriser des générations entières d’écoliers afin d’éradiquer définitivement les «patois», dans une absurde bataille contre les cultures régionales.

Mais, bien entendu, les Martiniquais parlent aussi le français, langue de l’éducation, des médias, du commerce et de la République. Comme dans d’autres régions de France et dans les autres territoires de la Francophonie, le français parlé (et écrit) en Martinique compte un certain nombre de savoureux particularismes locaux que les autochtones emploient fréquemment, sans se douter un instant que ces régionalismes sont souvent inconnus au-delà des rivages ensoleillés de leur île. Jusqu’au jour funeste où l’étudiant martiniquais à Paris ou à Bordeaux demande le plus naturellement du monde un «sachet» ou une «timbale» à un commerçant, et ne reçoit pour toute réponse que des yeux de merlan frit (puis une «gentille» remarque sur son accent). Hein? Comment? On cause pas pareil? Eh bien non, pas tout à fait.

Babiller : Rouspéter, protester, maugréer, vitupérer, fulminer. Le mot sous-entend un débit élevé de paroles prononcées, de préférence en créole et ponctuées d’un ou deux jurons.
Exemple: «Aïe bon Dieu! Tu as encore roulé sur les arums de Tatie Rosalie. Alors là quand elle va voir ça, elle va babiller.»
Bourg : Petite agglomération urbaine où l’on trouvera au moins quelques commerces et administrations (bureau de poste, gendarmerie), que ce soit le village de quelques rues à peine ou le centre-ville d’une des principales communes de l’île, par opposition à «la campagne», c’est-à-dire les quartiers ruraux alentour, où règnent en maître, à perte de vue, les champs de canne à sucre et les verdoyantes bananeraies régulièrement aspergées de pesticides nocifs pour la santé des riverains. Le Martiniquais ne se rend jamais au village, il «descend au bourg». L’exception qui confirme la règle, c’est bien sûr Fort-de-France, qui en raison de l’immense prestige que lui confère son statut de mégapole capitale, s’organise autour d’un «centre-ville», et surtout pas d’un bourg. Alors attention à pas vous emmêler les pinceaux, hein.
Exemple: «La pharmacie la plus proche est au bourg des Trois-Îlets. Elle est ouverte jusqu’à 19 heures.»
Le bourg de la commune des Anses-d’Arlet, ici vu depuis le Morne Champagne, est l’un des plus pittoresques de la Martinique.

Calotte : Claque, gifle, baffe, soufflet, torgnole, mandale. La double calotte donnée successivement sur les deux joues dans un même mouvement de la main porte le nom créole de palaviré, qui se traduit mot à mot par «Par là! Reviens!». J’espère que vous comprenez l’image.
Exemple: «Petit garçon, si vous continuez à faire l’intéressant, je vais vous donner une calotte!»
Les carreaux, c'est généralement à l'oral.
À l'écrit, ils perdent beaucoup de leur saveur.
Carreau (ou peut-être cahot ?) : Barbarisme, solécisme, faute de français. Le carreau est la hantise de l’orateur dans un pays où le complexe du colonisé est encore vif, où le «créolisme» que vous avez laissé échapper dans une moment d’inattention il y a plusieurs années continue de vous coller à la peau et peut vous être resservi au moment opportun, des décennies après les faits. Un «kawo» particulièrement savoureux suffit à vous ridiculiser pour l’éternité. En fait, un peu comme avec les crimes contre l’humanité, il n’y a ni prescription, ni droit à l’oubli en matière de carreau. À quand une comparution des pires récidivistes devant la Cour Pénale Internationale de La Haye?
Exemple: «Le prof de français est vraiment nul. En plus il fait des carreaux tout le temps.»
Carrer : Se dandiner, se pavaner avec un air de suffisance, le torse bombé ou, pour les dames, le dos bien cambré. Peut aussi signifier «snober quelque chose».
Exemple: «Ouais nèg’, les enfants ont carré sur le gâteau que je leur ai apporté. Franchement.»
Chabin, chabine : Le Larousse définit un chabin comme étant «une variété de mouton à la laine longue et grossière». Un mouton ? Longue et grossière ?!? Non mais allô quoi ! «Chabin» est l’un des mots les plus importants du vocabulaire antillais, et il n’est point question de bouc mal dégrossi, alors tenez-vous-le pour dit, Mussieu Larousse (Môssieur Larousse).

Une chabine martiniquaise. Et l’autre qui parlait de
«mouton à la laine grossière»... N’importe quoi!
Foin de brebis galeuses, un chabin, donc, est un individu «ethniquement noir», mais au teint clair. La négritude du chabin ne fait pourtant pas de doute, du fait des traits de son visage, ou de ses cheveux crépus, qui peuvent eux aussi avoir une couleur tirant sur le blond. Dans ce cas, on parle de «chabin(e) doré(e)». Magie du métissage !

Quoi qu’il en soit, avec une définition aussi élastique, la chabinologie est loin d’être une science exacte. Mieux vaut rester prudent, et se rappeler en toutes circonstances qu’héler une Antillaise en lui disant «Hé, Chabine!» fait le plus souvent très très mauvais genre.
Exemple: «Hé, Chabine!» Wabap! (bruit d’un palaviré retentissant sur les deux joues du malotru)
Chatrou : Poulpe, pieuvre ou kraken, bref, un céphalopode comestible à huit tentacules ayant (ou pas) un talent inné de pronostiqueur de matches de football lors des compétitions internationales.
Exemple: «Madame Sidonie, votre fricassée de chatrou était tout bonnement délicieuse.»
Cireur, cireuse : Se dit (en général plutôt affectueusement) d’un petit emmerdeur de première enfant espiègle, turbulent, vif, agité.
Exemple: «Les enfants de Clotilde sont tellement cireurs! Ils m’ont épuisé.»
Comparaison : En Martinique, comparaison est aussi un adjectif (invariable) pour qualifier une personne perçue comme snob, dont les goûts de luxe sont excessivement difficiles à satisfaire. Dans ce contexte, le mot se prononce alors «comparézon».
Exemple: «Tu n’aimes pas la morue? Ah, franchement, tu es trop comparaison, frère.»
Côté : Un certain nombre d’accessoires vestimentaires vont par paire. Un «côté» est un élément simple de la paire. Logique implacable. Nombreux sont les Martiniquais qui diront «un côté de gants» ou «un côté de chaussures» plutôt qu’un gant ou une chaussure. La simplicité, c’est pour les paresseux.
Exemple : «Aïe, aïe, aïe, je crois que j’ai perdu un côté de boucle d’oreille à la soirée chez Ketty hier.»
En dedans : À l’intérieur, dans la maison. Cela exclut donc les parties extérieures du logis comme le balcon ou le jardin.
Exemple : «Allons s’asseoir sous la véranda. Il fait trop chaud en dedans

Un Dacia Duster ou voiture de l’année 2013 en Martinique,
garé sur le parking de l’aéroport.
Essence (faire de l’) : Lorsque le Martiniquais signifie son intention d’aller «faire de l’essence», il ne sous-entend pas qu’il est sur le point de se rendre à la raffinerie de la SARA muni d’un baril de brut pour y distiller lui-même le précieux carburant dont est avide son luxueux 4x4 Dacia Duster acheté à crédit sur six ans chez Martinique Automobiles. Vous n’y êtes pas : votre interlocuteur projette plus prosaïquement d’aller faire le plein à la station-service. J’ai déjà entendu cette expression dans d’autres régions de France, d’ailleurs.
Exemple: «Il faut que j’aille faire de l’essence avant de monter à la campagne.»
Fiche que : Marqueur d’emphase au moyen duquel l’orateur martiniquais exprime une forme d’étonnement. C’est l’équivalent local de «comme» dans une phrase telle que «Comme c’était bon!»
Exemple: «Mon Dieu! Fiche que l’eau est froide!», exclamation que laissera échapper nécessairement tout Martiniquais à la plage après avoir hasardé un orteil dans une eau à moins de 26°C.
Fond : Vallée, vallon, encaissement. En Martinique, petite île volcanique au relief très accidenté, on ne parle guère de vallées, mais de fonds, un mot emblématique de la toponymie locale.
Exemple : «On n’a pas idée d’aller habiter dans un fond comme ça, en plus ça doit être infesté de moustiques toute l’année.»
Une maison dans un fond, non loin du bourg du Saint-Esprit, dans le sud de la Martinique.
France, français(e) : La France métropolitaine, l’Hexagone. Le Martiniquais est français. N’allez pas vous amuser à insinuer le contraire et mettre en doute sa francité. Si vous les contrariez sur ce point sensible, les plus calés en histoire n’hésiteront pas à vous rappeler que la Martinique est d’ailleurs devenue française au début du XVIIème siècle, soit bien avant la Lorraine, la Savoie, la Corse et votre mère... Cela dit, une certaine ambivalence reste de mise vis à vis de l’ancienne métropole coloniale devenue Mère Patrie en un tour de passe-passe en 1946, toujours située à huit heures de vol de nos plages d’eau turquoise et peuplée de gens bizarres qui ne comprennent que dalle quand on leur demande un sachet. De sorte qu’il n’y ait rien de plus normal que de parler de la France au lieu de la Métropole, et de désigner comme français nos compatriotes «pas de chez nous».

On parle aussi d’«oignons France» ou d’«abricots France» pour désigner les variétés importées d’Europe des susmentionnés fruits et légumes.
Exemple: «Les deux fils de Madame Joseph-Alexandre partent faire leurs études en France cette année.»
Gober : Rêver, rêvasser, bâiller aux corneilles. En Martinique, l’on ne gobe pas «les mouches», car on a sa dignité quoi, on n’est pas des crapauds ou des anolis, non mais sans blague. On gobe, tout court. Et cela suffit amplement.
Exemple: «Tu gobes ou quoi? Le feu est vert. Avance!»
Goyave (et goyavier) : La goyave est le fruit du goyavier, à la chair blanche ou d’une teinte rose plus ou moins intense. Le goyavier (psidium guajava) est un arbre fruitier de la famille des myrtacées originaire d’Amérique centrale et des Caraïbes. Son fruit s’appelle la goyave. CQFD.

La goyave, ça vient de chez nous, ça pousse chez nous,
alors on l’appelle comme on veut. D’autant plus qu’on a raison.
Jusque là, rien de spécifiquement martiniquais, ricane bêtement le lecteur non averti. ERREUR ! Le diable est dans les détails, et ici, le détail diabolique est la prononciation de ce petit mot à l’apparence si anodine. Impossible aux Martiniquais et aux «Français» d’accorder leurs violons sur cette question cruciale ! La goyave, éternelle pomme de discorde ? Pourtant, c’est nous qui avons raison, tout simplement.

Voyez plutôt : le mot goyave vient du vocable espagnol guayaba, lui-même issu d’un mot indigène précolombien. D’où le nom scientifique de la plante, psidium guajava. Ainsi, nous autres les Martiniquais, férus d’étymologie, latinistes distingués, prononçons correctement «gouayave». Un peut comme on dit «voyage», pas «voïage», comme on dit «royal» et «loyal», pas «roïal» ou «loïal». Un peu comme noyade ne rime point avec anchoïade, qu’on le veuille ou non. Question de logique, chers amis. Rien que de la logique. Alors, qui c’est qu’a raison, une bonne fois pour toutes? Hein? HEIN???

Dès lors, vous comprenez notre légitime exaspération à force de nous faire «corriger» à longueur de temps par le premier cuistre venu qui, débarqué de sa Béthune natale, n’a pourtant jamais vu le fruit en question de sa vie et ne serait même pas foutu capable de le distinguer d’une vulgaire noix de coco ! Et c’est hélas notre pain quotidien. On frise l’indigestion de ces «goïaves». De quoi vous donner illico des velléités indépendantistes face à tant d’outrecuidance.
Exemple : «C’est deu-euwo le kilo de goyaves, doudou.»
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. J’espère que vous avez apprécié ce petit «voïage» sémantique à la Martinique. Il reste tout plein d’autres mots mais je crois que je vais continuer à vous présenter notre français ensoleillé par petits bouts.

À venir au(x) prochain(s) numéro(s): béké, broder, heure de temps, lambi, major, maquerelle / makrèl, milan, moins, morne, mulâtre, pays, quimbois, ravet, sachet (enfin), et bien d’autres encore.

Ça n'a rien à voir avec le schmilblick, mais juste pour le plaisir, une photo du poste de secours à la plage des Salines. Parce que vous le valez bien.

25 commentaires:

  1. Oh le joli poste de secours totalement hors de propos! :-)
    J'ai encore jamais mangé de goyave, tu arrives à imaginer ça? Tu m'as donné envie avec ta photo, je vais remédier à cette lacune dès que je serai rentrée à Berlin (ici, dans la campagne mosellane, il n'y a pas goyave qui vive à des kilomètres à la ronde).

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    1. Et tu crois qu'il y a plus de goyaves à Berlin que dans la campagne mosellande??? Bon c'est vrai qu'avec un peu de chances, tu peux dégotter ça dans un supermarché de produits exotiques... Je t'accorde ma compassion, mais j'y crois: un jour, oui, un jour, Morille, tu mangeras une goyave fraîche. Tu m'entends? Ne baisse jamais les bras! :-)

      Sinon le poste de secours en question, je ne l'ai jamais vu en activité. Je ne sais pas, je ne dois pas venir les bons jours. Mais bon oui il est joli et décoratif, ça c'est sûr...

      Bonnes vacances à la campagne!

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  2. Super leçon! J'attends la suite avec impatience. :)

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    1. Oh, Olivier! Content de te retrouver par ici! Décidément, quel plaisir de voir revenir mes lecteurs petit à petit...

      Eh bien ne t'inquiète pas, il y aura une suite, c'est clair.

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  3. Trop bon! Comme une gouayave fraîche (pasque la confiture, c'est que du sucre...). Au fait, il me semblait qu'en créole, on disait "gouyav", et pas "gwayav"...

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    1. Mmmmh, le créole est une langue différente, il n'y a pas de raison que la prononciation d'un mot en créole détermine notre prononciation en français.

      En tout cas, je ne sais pas pour la Guadeloupe, mais en créole martiniquais, goyave se dit «griyav». Alors si on commence à se lancer sur les différences entre «eux» et «nous», on n'est pas sorti de l'auberge, malheureux!

      Et j'aime bien la confiture de goyave. Je m'en régale chaque matin au petit-déjeuner pendant mes séjours en Martinique. C'est certain que ce n'est que du sucre au sucre... mais tout ce qu'on mange ou boit en Martinique est complètement saturé de sucre de toute façon. Je n'en reviens pas...

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  4. Pour la notion de taille de village et autre bourg, tu vas en Beauce chez ma grand-mère et elle te tiendra le même discour. En plus il y a des nuances subtiles de taille en fonction du nombre de rue, de commerces, de connaissances y vivant et d'éloignement. Par contre point de goyave.

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    1. Ah certes je ne dis pas qu'on a le monopole sur ces expressions françaises, d'ailleurs un certain nombre de nos régionalismes antillais sont fréquents au Québec aussi (donc on voit d'où ils viennent), mais en tout cas ce sont des choses que je n'ai jamais entendues "en France".

      Rien que d'imaginer quelqu'un parler du "bourg de Jouy-en-Josas" ou du "bourg de Chevreuse" avec le même naturel avec lequel on dit "bourg de Trinité" ou "bourg du Prêcheur" en Martinique, ça me fait sourire et me semble hautement improbable. À ma connaissance, les Franciliens (ceux de ma génération en tout cas) disent plutôt centre-ville ou "coeur de ville" (wtf) ou alors village, et nous, le bourg. Sauf pour Fort-de-France, attention c'est subtil hein.

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  5. Zut, j'ai paumé mon "Créole de poche" (Assimil), donc je suis obligé d'abandonner cette discussion, de toute façon légèrement asymétrique entre un qui est tombé dans le jus de goyav/gwayav/gouyav/griyav* quand il était petit et un autre qui est au mieux un aimable dilettante.
    La prononciation antillaise est indubitablement la bonne, que dis-je: la meilleure! Mais ne serait-ce pas un cas de "spelling pronunciation", du genre "au grand dam(e)" ou "exa/exact"?
    Au fait, à ma connaissance, en Afrique francophone, on dit "goyave". Mais comme c'est un fruit américain, cf. ci-dessus.
    Quant à la canne à sucre, je la préfère nature, à mâchouiller, ou alors finement distillée, si tu vois ce que je veux dire...

    * http://www.potomitan.info/poullet/6-gouyav.php

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    1. Bah nan c'est pas asymétrique, nous avons tous les deux raison, mais toi ce que tu dis s'applique à la Guadeloupe, et moi à la Martinique. Ça ne va pas plus loin que ça. Je ne savais pas que les Guadeloupéens disaient "gouyav", j'ai appris quelque chose grâce à toi. Je ne connais pas très bien la Guadeloupe de toute façon. Mais, à ma connaissance, en créole martiniquais on dit seulement "griyav" (ou à la rigueur "gwayav" mais je ne suis pas sûr que ce soit "canonique"). Je n'ai jamais rien entendu d'autre...

      Nous avons l'habitude de nous chamailler avec les Guadeloupéens sur tout plein de choses, mais certainement pas sur qui a "raison" ou "tort" en matière de créole. Je crois que chacun accepte avec sagesse le fait que le créole soit légèrement différent entre les deux îles et y trouve plus motif à rire (gentiment) qu'autre chose. D'ailleurs, en Guadeloupe il y a bien la commune de Goyave n'est-ce pas? Enfin bon. En tout cas vraiment j'ai appris un truc aujourd'hui hein, avec cette histoire de "gouyav". Sacrés Guadeloupéens!

      An Griyav-La

      Pharmacopée caribéenne: Psidium guajava

      En fait, Manu, cela m'est égal qui a la "meilleure" prononciation. Si les "Français" préfèrent dire goïave, c'est très bien pour eux. L'ennui, vois-tu, c'est cette propension qu'ils ont à vouloir corriger le petit Antillais qui a forcément TORT face à n'importe quel quidam venu de l'Hexagone, même quand le gugusse en question ne connaît strictement rien à la goyave. C'est cela qui est pénible par moment. Alors forcément, face à l'arrogance (réelle ou seulement perçue) et l'incompréhension, on se radicalise. c'est toujours comme cela que ça se passe, hélas. J'espère qu'on n'en arrivera pas jusqu'au terrorisme pro ou anti-goyave...
      :-)

      Je sais que les Africains disent "goïave" à la française. J'ai été au début fort marri par cette "trahison" (lol), mais depuis je m'y suis fait et je n'ai plus de problème avec cela. Les Africains parlent un français bien à eux aussi, et ont la gentillesse de ne pas vouloir imposer leur français au reste de la Francophonie.

      Chouette poème sur la goyave! Je ne connaissais pas. Dès le troisième vers, c'est évident que c'est du créole guadeloupéen ("tini lésèz").

      Moi j'aime bien le jus de canne aussi. Ça a une superbe couleur de boue diluée dans de l'eau, mais c'est très bon :-)

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  6. Oui, le jus de canne, je n'ai pas osé...

    Maintenant, sérieusement, cher Berly: je crois vraiment qu'il y a bien des gens qui connaissent mieux la Gwadloup que moi, j'y suis juste allé deux fois pour quelques semaines (ce qu'on appelle de la recherche de terrain pour se faire payer le voyage) il y a très longtemps, j'ai lu un certain nombre de trucs dessus, mais je ne suis vraiment pas un spécialiste, et je ne parle pas vraiment créole. Par exemple, le poème de Poullet, j'ai pas tout compris (tini lésèz = ? Et comment on dirait en martiniquais?)
    Je comprends tout à fait ta réaction vis-à-vis des "Français", encore que... Pourquoi ne pas admettre une bonne fois pour toute que tout Français hexagonal, mais surtout francilien, voire parisien, possède la langue française dans toute son étendue, que seule sa prononciation est la bonne et que toute particularité antillaise, québécoise, belge, suisse ou africaine est tout simplement une faute, hein? C'est bien comme ça qu'on a éradiqué les langues régionales, au tour des français régionaux, maintenant: il n'est bon bec que de Paris, que diantre!
    Pour sourire un peu, deux petites anecdotes: au bord du lac Léman, à 10 km de la frontière française, une vieille dame m'a dit "Vous êtes Français, n'est-ce pas? J'avais bien reconnu l'accent"... j'ai trouvé ça génial! Et encore plus fort: un prof de fac espagnol m'a raconté qu'un chauffeur de taxi mexicain lui avait dit "Ah, vous venez de Madrid? Pourtant, vous parlez plutôt bien espagnol!"

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    1. Je ne sais pas ce que veut dire "lésèz". J'ai cherché mais là je capitule. Je suppose que c'est une variante de "moun".
      "Tini" c'est purement guadeloupéen, c'est une des façons de dire "il y a". En Martinique on dit "i ni" ou "ni", en Guadeloupe ils sont aussi "tini".

      "Jis tini lésèz la di griyav" c'est donc "Il y a même [lésèz] qui disent griyav".

      Ah, il n'est bon bec que de Paris, c'est un de mes poèmes préférés. Dommage que Villon ne soit qu'un Parigot tête de veau! :-)

      Pour ce qui est de l'accent dès qu'on passe la frontière, j'ai vécu ça à la frontière belge, dans la fameuse ville de Quiévrain. Elle est vraiment sur la frontière, en face des villes (villages? "bourgs"?) françaises de Quiévrechain et Crespin, dans une sorte de mini-agglomération transfrontalière. On traverse une rue et on passe de Crespin (FR) à Quiévrain (BE). Eh bé il suffit de la traverser, cette rue, et vas-y qu'on te donne tout de suite du "sept euros nonante". Comme quoi...

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  7. Cool, la page sur Psidium guajava!

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  8. Vivement la suite!
    Les exemples sont bien trouves.
    Merci.

    Valerie

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    1. Merci à toi Valérie!
      Vivement la suite de tes commentaires aussi :-)

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  9. J'adore cet article, et j'adore le créole ! Ou plutôt, les créoles (je maîtrise mieux le mauricien, et un peu le réunionnais, pas du tout le martiniquais, mais c'est étonnant de voir des ressemblances !). D'ailleurs, ici aussi on dit "calotte", et "en-dedans" (ou plutôt "endans", c'est plus court).
    J'ai hâte de lire la suite ;)

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    1. Moi je connais mal le créole des Mascareignes, fatalement, mais lors d'un séjour à la Réunion j'ai découvert quelques ressemblances qui m'ont frappé, notamment "marmailles". En créole martiniquais on dit toujours "manmay" ou "ti-manmay" pour dire "les enfants".

      C'est génial qu'on ait ce genre de mots en commun. Calotte, c'est vraiment fort je trouve. Comme quoi, même entre nos deux îles dans deux océans différents, à 15.000 kilomètres de distance, il y a bien un petit quelque chose de "créole" qui nous rapproche énormément :-)

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  10. Eh bah si même Libé me pique mes idées, on va plus s'en sortir, dites...

    Petit lexique pour la route des vacances

    :-)

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    1. C'est le début de la gloire! Je serais toi, je leur réclamerais des droits d'auteur :-)

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  11. >>>Exemple: «Petit garçon, si vous continuez à faire l’intéressant, je vais vous donner une calotte!»

    Ah ce fameux «vous» tant redouté quand on était petit ! Surtout quand il était précédé de ton prénom et de ton nom, ou de «mademoiselle» dans mon cas, tu savais que tu allais passer un sale quart d'heure.

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    1. Ou ja sav ;-)

      Dans le deuxième volet (en préparation), il faudra que je parle de ce "vous" qui n'est pas vraiment un vous de politesse.

      :-)

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    2. Je l'attends avec impatience cette deuxième partie. Morne, bourg, j'entends ma mère. Ça me faisait rire quand on vivait dans le Val de Marne. J'utilise souvent "comparaison". (N'oublie pas "soutirer" non plus.)

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    3. C'est un très bon mot celui-là! Merci de me l'avoir rappelé :-)

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  12. Je crois que ton explication de "côté" est ma préférée. Morne et bourg ne sont pas loin. Au fait, au lieu de "je crois que j’ai perdu un côté de boucle d’oreille", ne dirais-tu pas "je crois que j’ai perdu un côté d'anneau". A moins que ce soit dans le Sud seulement !

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    1. Bien sûr j'ai bien plus souvent entendu «côté d’anneau», mais j'ai eu peur de trop dérouter mon lectorat principalement zoreille ;-)

      Il faudrait inclure «anneau» dans la liste, du coup. Ainsi tout s’éclairera.

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Un petit bonjour ?

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